L’Ergot

C’est quoi un bressan ?

Ben oui ! Commençons par le début ! Mais avant tout, sachez que nous vous donnons désormais rendez-vous tous les mois pour traiter d’un sujet qui concerne notre belle région. De l’actualité, de l’histoire, de l’humeur peut-être (bonne ou mauvaise) qui aura marqué votre serviteur et dont il souhaitera vous faire part. Avec humour, je l’espère. Quoi de plus gratifiant que de vous faire sourire ! En vous informant, autant que possible.

Mais revenons à nos moutons, même si nos amis ovins ne sont pas représentatifs de notre beau pays. C’est quoi un Bressan ? Point là de velléité identitaire bien loin des valeurs de l’Académie. Pour nous, un Bressan est celui qui aime ce territoire – j’utilise à regret ce mot qui revêt quelques atours péjoratifs sur lesquels je reviendrai. Qu’il y soit né, qu’il y habite, ou les deux. Qu’il y ait fait sa vie ou qu’il l’ait quitté. Qu’il y exerce ses talents ou qu’il exporte ses compétences dans d’autres régions ou d’autres pays, quelle importance. L’essentiel réside dans son engagement – petit ou grand – dans le développement ou la promotion de la Bresse.

Pour compléter cette définition, je dirai ce qu’un Bressan n’est pas. Pour casser les clichés qui ont quelquefois la vie dure. On l’appelait parfois “ventre jaune”. Parce que sa nourriture reposait sur la farine de maïs, nos fameuses “gaudes” paraît-il ! D’autres affirmaient que c’était dû aux pièces d’or qu’il cachait dans sa ceinture. Pas très logique tout ça. Si notre bressan avait la ceinture cousue d’or, pourquoi se serait-il contenté d’une nourriture somme toute assez pauvre ? Il n’est pas, comme certains visiteurs ont pu l’écrire, défini par trois L. “Long, lent, lourd”, voilà ce qu’ils auraient dit. D’aucuns auraient même ajouté “laid et lâche”. Les gens qu’ils ont croisés n’avaient peut-être pas un physique de mannequin, certes. Mais quand on était paysan ou artisan – et souvent les deux – jusqu’au début du siècle dernier, il fallait des muscles et un corps pas trop fragile. Et ne pas être belliqueux ne signifie pas être lâche.

Ce qui nous paraît important de souligner, à l’Académie, c’est que “être” ou “se sentir” Bressan, n’est pas exclusif. On peut être Bressan et Breton, Bressan et Parisien, Bressan et Japonais, qu’importe. L’amour de notre terroir est sans jalousie. J’en sais quelque chose. Après plus de 35 ans d’absence de cette Bresse qui m’a vu naître, j’ai croisé des personnes et des endroits auxquels je me suis attaché. Et cet attachement ne m’empêche nullement d’apprécier les retrouvailles. Comme disait l’autre, les amis de trente ans, ça compte. Et ceux-là ne me trahiront pas.

En bref, pas de droit du sang ou de droit du sol par chez nous. Simplement le droit de celle ou celui qui se sent bien en Bresse et qui le revendique.

Quelques précisions sémantiques avant de nous quitter. J’ai utilisé le terme Bressan sans connotation “genrée” qui eût été fort mal venue. Commodité de langage qui incluait nos amies bressanes, bien entendu. Et j’avoue avoir quelques réticences à manier l’écriture inclusive. J’aurais volontiers développé, mais ce n’est pas le propos.

J’ai utilisé plus haut le mot territoire. Par commodité là aussi. Pour suivre le “mainstream” comme on dit dans les cocktails. Mais je ne peux m’empêcher de faire le parallèle avec les territoires tels qu’ils sont définis dans certaines contrées, comme le Canada ou l’Australie. En fait des régions sans autonomie dont l’administration relève exclusivement du pouvoir central. Cette terminologie est-elle l’émanation d’un état jacobin ou est-ce le pur fruit du hasard ? Pas de quoi en faire un fromage – pas même du Bleu de Bresse – mais ça me gêne quand même un peu aux entournures.

Last but not least. Désolé ce n’est pas de l’arpitan. Cet édito est accompagné d’un dessin d’Éric Martelat, Académicien aux multiples talents. Une interprétation en duo d’un même sujet. Il devrait en être ainsi chaque mois. Sauf à ce que l’un de nous deux se fasse porter pâle. Mais on est vacciné, alors, vous pouvez compter sur nous.